Tiré d’un verbe latin signifiant parler au travers, la persona désignait dans l’antiquité le masque que portaient les acteurs de théâtre… Du Volta vénitien à la tragédie grecque, passant par les dispositifs fabuleux portés en Afrique lors des cérémonies funéraires ou initiatiques, le masque a toujours été la parure du genre humain.
D’un habile rhéteur, d’un intriguant, d’une courtisane ou d’un diplomate qui sait son métier au bout des ongles, ne dit-on pas qu’ils avancent masqués ?
Du factice au vraisemblable il n’y a qu’un pas ; et de l’artifice au naturel que l’épaisseur d’un cheveu.
Lorsque les fasciés emplumés préludent au massacre sur les marches des temples méso-américains - autels sanglants en plein air ;
Lorsque surgissent la nuit dans la savane les gueules peintes des hommes léopards, ces griffeurs des folles espérances ;
Et tant d’autres encore, mû par d’irracontables instincts.
Ils ne font qu’assassiner les apparences…
Qu’il soit instrument de séduction ou d’effroi, le masque n’en a pas fini de fasciner et de servir aux plus sourdes fantasmagories !
Chez Jung la persona fut interprétée comme le ‘masque social’, cache-misère à nos blessures, et dont, par obligation, nous nous affublons pour rendre la compagnie de nos congénères supportables.
Sans ces oripeaux hypocrites, pas de vie sociale possible.
A chaque situation son vêtement propre.
Un vieux proverbe grec nous met en garde : « la barbe ne fait pas le philosophe » ; il n’empêche, une face ‘empoilée’ confère d’ordinaire au plus plat prosateur un petit air de respectabilité.
Et qui sait si, à force d’incarner notre rôle, nous ne finissons pas par nous y identifier.
A l’heure où fleurissent un peu partout, sur les friches d’un hédonisme forcené, les tests de personnalités ; introspection oblige !
Exhortation à ôter le masque pour mieux se mentir à soi-même, tel semble être l’impératif catégorique des sots.
Le connais-toi toi-même du vulgaire est en nos sociétés promis à un bel avenir…
On en oublierait presque le masque mortuaire.
Le seul promis à réel un avenir.
Notre unique certitude ;
Là, lorsque cesse le jeu.
Ces quelques digressions sans prétentions ni buts, ont pris leur source dans la singulière résonance que j’ai cru déceler entre deux images. Aussi, mon intention initiale, sous l’effet d’une impulsion dilettante, n’était de ne commettre qu’un billet sans texte.
Seule une légende humoristique, en guise de clin d’œil, devait accompagner cette synchronicité des plus factices.
Par un mouvement d’humeur incompréhensible je me suis laissé à développer une vaine cogitation autour de la persona. Si bien que mettre à présent en illustration du billet ladite photographie a perdu son sens.