Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 18:28

Crise

 

Jean Gadrey

  Crise écologique et crise économique

 

 

Conférence du 04 Mai 2010 - Université de Lille 1.

 

   

 


Voici une transcription, la plus fidèle possible que j’ai faite, de la conférence donnée par Jean Gadrey le 04 Mai dernier, à l’université de Lille 1, pour conclure le cycle " La crise " des rendez-vous d’Archimède.

 


 Blog de Jean Gadrey

 


 

Intervention de Jean Gadrey, Professeur d'économie à l'Université de Lille 1, membre de la Commission Stiglitz et animateur du collectif FAIR (Forum pour d'autres indicateurs de richesse), le 27 Janvier 2010 lors des Assises de l'Energie à Dunkerque

 


 PARTIE 1 - Crise systémique à forte dimension écologique

 

Introduction

Accumulation de plusieurs crises interdépendantes : crise financière, se prolongeant par une crise économique (effet emploi, dettes, etc.). Crise sociale (explosion des inégalités). Et puis il y a une dimension de crise écologique dont les experts ont peu parlé.

 

Composante sociale de la crise systémique 

 

Jean GadreyIncroyable montée des inégalités. Le niveau de vie des plus modestes a stagné, voire a baissé, tandis que les revenus des plus riche a explosé dans le même temps (Aux USA, 10 % des plus riches captaient 30% des revenus des ménages de 1950 à 1980, et aujourd’hui ils en captent 50%. En France la tendance est la même (moins spectaculaire)).

 

* Pourquoi cette montée des inégalités a jouée dans la crise ? Les revenus devenus énormes des très riches, étaient à la recherche des rendements les plus élevés possibles. Ils se sont orientés vers les grandes entreprises et la spéculation qui semblaient être la source des plus grands gains possibles ; sur tout ce qui grimpait vite (immobilier, pétrole, matières premières et denrées alimentaires. Dans le même temps les ménages US modestes ont fortement été incités à s’endetter (proposition de crédit avec perspectives spéculation faciles et gains rapides). Ainsi les riches du monde entier ont prêtés à des taux usuraires aux ménages modestes, via la finance incontrôlée qui a inventé les outils sophistiqués de l’usure moderne : rien ou presque de la crise des subprimes ne se serait produit dans une société beaucoup plus égalitaire, et avec les logements sociaux descends pour tous.

 

Composante écologique de cette crise globale 

Période 2003 / 2008 : envolée des prix du pétrole ainsi que des matières premières et des produits agricoles. Il y a une composante spéculative, mais qui s’est adossée sur une tendance à la raréfaction : la rareté facilite la spéculation : diminution des terres arables ; réduction des ressources en eau ; effets d’érosion et désertification des sols sous l’effet de l’agriculture productiviste ; dérèglement climatique qui devient le principal frein du développement humain (rapport 2008 des nations unies pour le développement). Montée en puissance des agro-carburants, qui ont signifiés une réduction des terres destinées à l’alimentation au bénéfice des terres destinées aux pompes à essence : tout cela à amplifié la crise de l’immobilier et la pauvreté dans le monde (il devenait de plus en plus cher de se loger, de se nourrir, de se chauffer). ==) Nous assistons à la première crise socio-écologique du capitalisme financier et boursier ; la première où des phénomènes de raréfaction des ressources, de dégâts écologiques, ont eut une influence sur le plongeon économique, même si ce n’est pas l’influence la plus importante. Mais avec une probabilité non négligeable qu’à l’avenir le rôle des facteurs écologiques soient de plus en plus décisif.

 

" Croissance verte " 

Définition

Hypothèse qu’on peut rendre compatible les objectifs de soutenabilité écologique et le maintient de la croissance économique à long terme.

On ne s’en sortira pas avec le terme et la notion de " croissance verte " (la croissance est devenue croyance).

 

Qu’implique la croissance " verte ", et pourquoi ce n’est pas la solution : 

Exemple, du scénario du conseil d’orientation du plan des retraites, on fait l’hypothèse qu’il y aura une croissance de 2% par an jusqu’en 2050. Qu’est-ce que cela signifie ?

 

Trois arguments pour en démontrer l’inanité.

  

Premier argument - que représente 2% de croissance ?

 2% par an de croissance signifie la multiplication par 6 des quantités produites en 2100, etc. Franchement 6 fois plus de quoi ? Dans les pays riches est-ce seulement sensé indépendamment même des considérations écologiques ?

 

Second argument  - Réduction des GES

Pour diviser par 5 nos émissions de gaz à effets de serres (GES) d’ici 2050 en France (objectifs fixés par les nations unies), il faut les réduire de 4% pendant 40, soit autant chaque année que ce que nous sommes arrivés à faire en 10 ans. Cela ne sera pas facile s’il n’y a pas de croissance. Mais si on vise en plus une croissance de 2% par an (des quantités produites), cela signifie qu’il faut réduire nos émissions de 6% par an par unité produite (de nouvelles technologies, les nouveaux comportements vont émerger mais on n’en connaît pas leur contribution à la réduction de la pression écologique, alors que la montée des périls est certaine).

  

Troisième argument - Seuils à ne pas franchir

Il n’y a pas que le climat. Il faut raisonner en terme de seuils écologiques à ne pas franchir, et il n’y a pas que celui des émissions des GES.

  

Ressources renouvelables - Seuils déjà dépassés :

 

3.1) Climat

Pour le climat, on sait a peu près à quel moment l’humanité a franchi le seuil de soutenabilité de ses émissions (moment ou le volume des émissions de GES d’origine humaine a dépassé ce que les puits de carbone peuvent séquestrer naturellement à leur propre rythme (forêt, océan, etc.). C’est en gros la fin des années 1960.

 

3.2) Réduction de la biodiversité 

Le rythme de disparition des espèces est 10 fois supérieur à un rythme soutenable à long terme.

 

3.3 ) Azote

L’azote prélevé dans l’atmosphère pour les activités humaines (4 fois supérieur à un rythme soutenable à long terme)

 

Ressources renouvelables - Seuils en voie d’être dépassés :

 

3.4) Seuil d’acidification des océans

3.5) Diminution de l’ozone dans la stratosphère.

3.6) Déforestation des forêts

Déforestation des forêts primaires, qui sont les plus gros puits de carbone source de biodiversité.

(La forêt amazonienne à perdu 15% de sa surface depuis les années 1970).

 

3.7) Diminution des terres agricoles

Diminution des terres agricoles et fertilité des sols qui se dégrade, etc.….

 

Ressources non-renouvelables - Seuils en voie d’être dépassés, ou dépassés :

Ressources indispensables à la croissance.

 

3.8) Matières fossiles et minerais.  

Le Pétrole (Pic du pétrole dépassé ? ) ; Plomb (2030/2040) - Argent (2020- 2040), cuivre, uranium, le nickel, ainsi qu’une série de métaux rares indispensables à l’industrie.

 

Avocats de la croissance

Les avocats de la croissance verte (modernité scientiste à l’ancienne) nous disent qu’elle viendra des nouvelles technologies. On peut en douter avec tout ce qui vient d’être dit. Mais en outre, ces derniers ne semblent pas avoir consulté les bilans carbone de ces nouvelles technologies. Exemple : un ordinateur de bureau standard représente (sans compter son fonctionnement) pour sa production, son transport et sa commercialisation 1,3 t de C02 et 1500 litres d’eau , soit, dans un monde durable où chaque personne à un droit égal d’émission de C02, il ne faudrait pas dépasser 1,7 t par habitant et par an. Faut-il encourager la croissance indéfinie de production d’ordinateurs, ou faire d’autres choix pour une informatique accessible, partagée, recyclable et à très longue durée de vie (ce qui est catastrophique pour la croissance) ?

Il y a bien d’autres thèmes de réflexions, car les modernes scientistes ont des tas d’idées pour développer la " croissance verte " : OGM ; agro-carburants, le stockage du carbone , le nucléaire, l’économie fondée sur l’hydrogène.

 

Enjeux géopolitiques

Guerres pour l’accès aux ressources (risques de conflits écologiques majeurs). Si les choses ne sont pas gérées démocratiquement, la tendance pourrait être à la constitution de sortes d’apartheids climatiques ou écologiques : réservation d’espaces adéquats afin de continuer à vivre dans le luxe. Le problème que pose ce genre de scénario, c’est le risque de guerres autour du contrôle et de l’approvisionnement des ressources naturelles jugées stratégiques pour la croissance, par les pays riches, par les riches des pays riches, ou par les firmes des pays riches. On sait que dans un pays riche, comme la France, l’espace écologique que l’on utilise pour assurer notre mode de vie et notre mode de consommation est bien supérieur à l’espace écologique du pays. C’est la dette écologique. Il faut donc aller chercher ailleurs ces ressources dont on a besoin. Lorsque c’est relativement pacifique le commerce y pourvoie (encore que lorsque c’est la version OMC c’est pas du commerce équitable). Mais quand ça ne suffit pas, les guerres sont là.  

L’existence d’un lien entre les guerres et l’accès à des ressources naturelles, n’est en rien l’annonce de catastrophes futures sur le mode : avec la crise écologique ca va être la guerre partout. Si ce lien existe, on peut raisonnablement défendre l’idée qu’une politique mondiale des énergies alternatives ambitieuse, serait un facteur majeur d’atténuation des conflits mondiaux .  

On considère qu’il faudrait dépenser par 400 à 500 milliards par an dans le monde jusqu’à 2050 pour tenir les objectifs climatiques. Pour idée, les dépenses annuelles de publicité dans le monde sont de l’ordre de 600 milliards, et les dépenses militaires de 1500 milliards. Prenons le cas des USA (estimation Stieglitz) : le coût des 2 guerres majeures d'Irak et en Afghanistan initiées par les USA, est de 3000 milliards de dollars sur 15 ans, soit 200 milliard de dollars par an. Supposons qu’en 2003 les USA se soient lancés dans un programme ambitieux pour le développement des énergies renouvelables, plutôt que de se lancer dans une guerre ruineuse pour les puits de pétrole et les gazoducs, ils auraient pu y consacrer 200 milliards de dollars par an. Cela aurait réduit de manière considérable leur dépendance incroyable envers ces énergies.

 

 

PARTIE 2 - comment en sortir ?

Quels pourraient être les richesses économiques et l’emploi d’un modèle de développement fondés sur la soutenabilité écologique et sociale ? 

Quels seraient les contours d’une économie soutenable vers laquelle on pourrait tendre par étape, et qui serait socialement acceptable, mais même désirable (peu être pas par les 0,1% du haut).

 

Point 1. Produire et consommer autrement serait bon pour l’emploi, pour l’économie et sur le plan social

Il serait temps de substituer à la logique de toujours plus de quantité, une logique de toujours plus de qualité, de durabilité et de sobriété matérielle. Dans ce schéma, on réoriente par étape la production d’une façon telle, que cela n’exige pas moins d’emploi ni moins de valeur ajoutée, mais probablement plus dans la majorité des secteurs. Cela exigerait beaucoup d’innovations et beaucoup de recherches. C’est tout sauf une stagnation, c’est tout sauf la fin du progrès.

Les chiffres de la croissance indiquent l’accroissement des quantités produites, mais ignorent la montée de qualité et les gains de durabilité des produits. Si un produit est moins cher mais de moindre durabilité et plus coûteux en émission de GES, il sera déduit que cela augmente le pouvoir d’achat.

On peut avoir du développement économique, durable, innovant, riche en emplois, et en valeur ajoutée, sans croissance des quantités, parce que la plupart des processus de production les plus économes en énergie et matériaux, exigent plus de volume de travail que les productions productivistes, polluants et surexploitant les ressources naturelles, et le cas échéant les hommes et les femmes

Exemple : l’agriculture  représente 3% de population active actuellement. Si on remplaçait  l’agriculture productiviste, dont on ne mesure nulle part dans les chiffres de la croissance les dommages sur l’environnement et sur la santé, par une agriculture de proximité et écologique faudrait nettement plus de travail et de valeur ajoutée pour produire les même quantité. WWF et d’autres ont faits le même scénario sur les énergies renouvelables modernes. On peut faire le même type de raisonnement pour les logements à faibles niveaux d’émissions, la transformation du système écologiquement aberrant des grandes surfaces en commerces de proximités modernes, le développement du recyclage, la réparation, etc. On peut aussi réorienter les transports : la confédération européenne des syndicats a fait un scénario à 2020 : si on basculait une bonne partie du transport motorisé (véhicules individuels et camions) vers des transports collectifs nettement plus doux avec l’environnement, on créerait beaucoup plus d’emplois dans les transports ainsi développés qu’on en supprimerait dans l’industrie automobile. A ceci, il faut ajouter l’amélioration nécessaire de la qualité des services de bien être et développement humain, associés à des droits qui devraient être universels dans l’éducation, la santé, la justice, les soins aux personnes âgées, aux handicapés à la petite enfance, etc. On y applique aujourd’hui une logique de performance industrielle de réduction des coûts, qui menacent la qualité individuelle et collective de ces services et qui nuisent à l’emploi.  

Il existe une série de secteurs (exemple pic de pétrole) où y a des reconversions qu’il va falloir tenter d’anticiper plutôt que les subir en catastrophe, mais d’une part ces activités ne représentent que 10 à 15 % de l’emploi, et d’autre part si on y réfléchit en terme de planification sur 20 ans, on a les moyen d’éviter des catastrophes comparables à celles qu’on a connues dans le passé dans certains secteurs.

 

Point 2. Condition impérative : il faut réduire fortement les inégalités.

 

En finir avec les inégalitésSi on produit plus vert et plus social et que le niveau d’inégalité interdit à une bonne partie de la population d’accéder à ces biens et à ces services, écologiquement et socialement préférables, et donc forcément plus chers, alors ce système réorienté ne marchera pas. C’est bien beau de faire du HQE, mais il faut en même temps faire du HQS (haute qualité sociale). Il faut une vrai rupture avec le système que le capitalisme a mis en place ces 50 dernières années, et qui consistait au fond à susciter par des dispositifs extrêmement puissants, dont la publicité et le crédit, une avidité permanente d’achats de biens et de services, sans cesse multipliés en quantité.  

Il faudrait passer à autre chose, qui est non pas l’augmentation constante des quantités sur la base des gains de productivité permanents, mais quelque chose qui serait un partage de gains de qualité et de durabilité. Qu’est-ce qui va se passer si on laisse faire le marché dans ce domaine ? Les biens et les services issus de ces productions écologiquement et socialement durables seront en moyenne plus chers que les anciens. Et pour beaucoup de gens, dans l’état actuel des inégalités, ils seront tout bonnement perçus comme trop chers pour eux. Ils continueront à faire du hard discount parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement. Il faut des politiques publiques permettant de rendre les productions durables accessibles à tous ; et donc une économie soutenable écologiquement et socialement, y compris permettant de créer des emplois utiles, qui auraient un autre sens (ce n’est pas la même chose que de travailler comme agriculteur dans une AMAP, que comme agriculteur déprimé dans le cadre de l’agriculture productiviste, des subventions à l’hectare et des fruits qu’on laisse sur les arbres parce que les cours sont trop bas).  

Il faut réduire fortement les inégalités et favoriser la sobriété matérielle , à l’opposé de l’avidité consumériste. Cela ne veux pas dire du tout se serrer la ceinture : cela veux dire des dispositif de délibération permettant de faire la part des choses entre l’utile et le futile. De se dépendre de l’emprise excessive de la publicité, du marketing et d’un certain nombre de dispositifs de crédits. Ca suppose d’investir massivement dans les productions les plus douces pour la nature et pour la société au prix d’une vague d’innovations, qui ne sont pas seulement technologiques (cas des AMAP). Ces investissements seront-ils coûteux ? Oui et c’est très bien comme ça, parce que d’une part il va y avoir du travail pour réparer tout ce qu’on a détériorer ou anticiper les risques évoqués plus haut, et d’autre par ils seront beaucoup moins coûteux que l’inaction ou la mollesse face à la crise écologique à venir.

  

Point 3. Condition impérative : ca suppose de reprendre le contrôle public et citoyen de la finance.

 

 

Conclusion

Pour conclure, il faut distinguer assez clairement une économie vraiment soutenable, c’est à dire débarrassée du culte de la croissance, associée à une maîtrise collective de la finance, à une nette réduction des inégalités. Il faut la distinguer du simple verdissement du capitalisme, du capitalisme financier et productiviste et inégalitaire qui est encore aux commandes. Il faut le faire, parce que ce dernier n’a aucune chance de nous sortir de la zone des tempêtes à répétitions et de la crise écologique non plus. Il faut le faire, parce qu’il y a une incompatibilité irréductible entre ce que Greenspan appelait " l’exubérance irrationnelle des marché," et l’exigence écologique d’anticipation, voire de planification démocratique. On ne s’en sortira pas sans une coordination mondiale des efforts.

 

Puisque cette crise est systémique et qu’elle a une dimension écologique, il faut agir sur toutes ses composantes, économiques, financières, sociale et écologiques.

 

Partager cet article
Repost0
5 avril 2010 1 05 /04 /avril /2010 22:30

CriseJacques Rancière

 

Y a-t-il des crises politiques ?

Conférence du 16 Mars 2010 - Université de Lille

 

 

   

 


Voici la transcription, presque fidèle (à quelques passages près), de la conférence donnée par Jacques Rancière le 16 Mars dernier, à l’université de Lille 1, dans le cadre d’une série sur " La crise ".

Travail fastidieux mais pas inutile. 


 

Introduction :

La crise dans la tradition médicale hippocratique n’est pas du tout le moment de l’apparition des symptômes, c’est le moment décisif, de l’issue positive ou négative. C’est le moment ou tout diagnostique est inutile.

Aujourd’hui, la crise désigne non pas l’épisode dramatique qui fait dénouement, mais quelque chose comme un sentiment diffus de mal être. Dans le langage médiatique, le concept de crise de la démocratie est souvent traduit en " malaise dans la démocratie ".

 

Sur les réponses données pour expliquer la crise :

(par les experts en diagnostics sur la santé et maladie des corps sociaux)

Jacques Ranciere Ce qui ne va pas c’est la désaffection des citoyens à l’égard de la politique, à l’égard du lien démocratique ; en gros c’est qu’on n’y croit pas. L’illustration classique, c’est toujours l’abstention aux élections. Il y a tout un discours qui nous dit qu’il y a une espèce de crise croissante qui se montre par le fait qu’il de plus en plus d’absentions (c’est pas vraiment vrai, il n’y a pas de courbe régulières de croissance d’absentions) mais on a un discours régulier sur la question (à titre d’exemple vers 1880 un journal anarchiste suite à des élections avec fort taux d’abstention concluait qu’on était à la fin du système électoral, que personne n’allait plus voter . Ceci pour relativiser le phénomène qui sert à l’illustrer). L’important ici c’est qu’on a déjà la cause.

 

Solution proposée  (par ces même experts) :

réinvestissement de l’idéal démocratique par l’ensemble de la société. Tautologie : ce qui ne va pas c’est qu’on n’y croit pas, et le remède c’est que tous y croient  (le mal est sensé venir d’un défaut de croyance).

 

Diagnostic moderne et tradition de l’art politique :

Ce type de diagnostic s’oppose à veille tradition de l’art politique qui va en gros de Aristote à aux grands classiques du 18e (de Montesquieu à Madison). Cette tradition était attachée à une vision organique du corps politique, et pourtant, la question de la santé et de la maladie du corps politique ils ne la traitaient pas en termes médicaux, mais en termes de mécanique. Pour eux c’était d’abord la question des institutions ; du rapport entre les parties constituantes de la cité ou de l’état. Dans tout l’âge classique le problème est posé très simplement : fondamentalement il y a deux parties : le peuple et le petit nombre des aristocrates, oligarques, propriétaires, etc. A partir de là, la question de l’équilibre était pensée comme les rapports entre les parties ; quelle part chaque partie doit avoir au pouvoir, de choisir et de décider. Aristote pose la question ainsi : c’est le rapport entre ce dont une partie de la société est capable et ce qui doit la satisfaire (un général pour conduire une armée, un architecte pour construire un bâtiment, etc.). Mais, dit Aristote, il y a un danger à exclure le peuple d’un certain nombre de choses, mais ce danger est conjuré parce que le peuple est capable de dire qui doit commander ou qui est le bon architecte. Il y a un optimum du rapport entre ce que chaque classe souhaite et ce qu’elle peut effectivement. Cet art défini les mécanismes de fonctionnement des institutions et une forme d’éducation, visant à former le type d’homme faisant fonctionner ces institutions. La question de la santé et de la maladie dans cette tradition de l’art politique, c’est une question de l’équilibre de forces conflictuelles ; d’où le mal aura deux grandes formes : la sédition (dérèglement du mécanisme, le déséquilibre lorsque une partie prend trop de poids) et la décadence (corruption du principe même ; de l’idée même de la communauté comme équilibre entre deux partis conflictuels).

 

Explications actuelles des causes de la crise :

Ce qui semble significatif c’est que dans les discours actuels de la crise de la politique, il n’y a aucun intérêt pour ce genre de question. Le mal est définit comme perte d’adhésion, perte de foi, incroyance, perte d’adhésion, d’investissement de l’individu citoyen sur le collectif. Sur cette base, il n’est pas difficile à ceux qui se définissent comme docteurs en science de la santé sociale, de dire que c’est à cause de l’individualisme ; on a perdu le sens du collectif, conséquence d’une pathologie globale de la société, voire de la civilisation : à savoir le développement de l’individualisme : c’est dit-on la logique du marché, la société de consommation qui entraîne les individus à la recherche narcissique de la jouissance individuelle avec deux conséquence : un désintérêt pour le collectif (conséquence directe) ; des formes de mouvement et de révolte centrée sur la lutte contre l’autorité (conséquence indirecte). (Voir les cascades des discours de réinterprétation de mai 68 qui expliquent que la lutte antiautoritaire a conduit à la destruction des liens collectifs assurant le lien social, de la destruction des croyances collectives : famille école, religion, etc. L’effet à long terme en aurait été le triomphe du marché et donc de la ruine de la politique). Ainsi on ne donne pas à la crise de la politique une cause politique, mais une sorte de cause civilisationnelle (monde désenchanté, vidée de transcendance).

Ces explications posent un problème : la cause (crise de civilisation) est trop large pour l’effet. Ceux qui posent ce diagnostic identifient en général ce qu’ils appellent crise de la politique avec la perte d’enthousiasme pour les institutions représentatives. Le problème est le suivant : si on identifie l’exercice politique simplement avec le fait de choisir de temps en temps des gens à qui on délègue le soin de s’occuper pour vous de la politique, premièrement on aura du mal à prouver que cet exercice requiert une adhésion forte à des valeurs collectives transcendantes. Deuxièmement on aura du mal à prononcer qu’il est compromis par les habitudes crées par les habitudes de l’activité consommatrice. Troisièmement, on rencontra la contradiction : à savoir que les mauvais citoyens qui refusent de s’enthousiasmer pour les choix des membres des diverses assemblées sont capables par ailleurs des plus grandes dépenses d’énergie, soit pour aller soigner des malades au bout du monde, soit pour empêcher qu’on expulse une lycéenne, etc. On sait que les analystes de la crise on leur réponse : ces gens sont atteints du péché individualiste puisqu’ils choisissent leur militantisme, d’agir par eux même en fonction de leur conviction, au lieu de faire leur devoir de citoyen, qui est un devoir de délégation. Pour ironiser, on dirait que pour ces analystes la crise de la démocratie consisterait en ce que des gens, à qui on dit que la politique est l’exercice de leur libre choix, prennent au sérieux ce qu’on leur dit alors qu’ils devraient comprendre que leur liberté est d’abord la liberté d’adhérer.

  

 

Logique de représentation et d’élection :

La logique de la représentation et celle de l’élection, dans leurs principes n’ont rien de démocratique. La représentation dans son origine est un principe oligarchique, aristocratique : participent au contrôle du pouvoir ceux qui ont un statut qui les qualifient pour cela. Quant à l’élection, originellement c’est un acte d’approbation de la légitimité d’un pouvoir. Donc il faut bien voir que originairement l’idée représentation et de l’élection signifiaient le contraire de ce qu’on leur fait dire à l’époque moderne : non pas l’exercice du pouvoir du peuple, mais au contraire le rôle du peuple est fondamentalement d’approuver l’exercice du pouvoir par ceux qui étaient qualifiés pour l’exercer.

  

 

Transcendance collective perdue ? :

Au lendemain de la révolution française, les contre révolutionnaires (Joseph de Maistre, Bonald) disent : autrefois la société était un organisme (la tête et les membres étaient à leur place). Les individus se trouvaient naturellement à leur place dans des corps collectifs où ils étaient encadrés, disciplinés protégés et trouvaient leur place dans la féodalité, monarchie, corporation, etc., sous la loi de la transcendance divine. Ce tableau ce répand et tout le 19e va le reprendre. Malheureusement arrive le principe destructeur, qui est le principe du choix individuel. C’est arrivé d’abord, disaient-ils, avec le protestantisme, où chacun interprète la parole de dieu, c’est devenu après le principe des Lumières, où chacun fait usage de sa raison. C’est devenu ensuite le principe dévastateur du citoyen abstrait, et en conséquence de quoi la société s’est trouvée atomisée. Les individus se sont trouvés désaffiliés. C’est cette espèce de ruine de l’organisation du corps social qui est responsable de la catastrophe révolutionnaire.

S’est imposé à ce moment, et qu’on a vu ressurgir abondamment ces derniers temps, une dramaturgie de la communauté, du corps collectif dissout par l’irruption individualiste. Elle a refoulé celle de l’ancien art des mécanismes équilibrant les rapports entre les parties de l’état. Au lieu de cela elle a mis en place cette espèce de scène pathologique de la transcendance collective perdue. Le problème c’est qu’elle s’est imposée comme une description adéquate du monde moderne. Au fond la critique de la consommation, du marché, du spectacle, ont été transformés en critique de l’individualisme démocratique. Autrement dit, ce qui était pensé comme la marque d’un système spécifique de domination est devenu, et a été transformé en symptôme de l’individualisme démocratique considéré comme catastrophe civilisationnelle. Le résultat c’est qu’il y a une surdétermination étrange du thème contemporain de la crise de la politique ou de la crise de la démocratie : d’un coté on dénonce l’égoïsme qui est sensé pervertir les mécanismes de la représentation, mais de l’autre, on le fait sur le fond d’une théorie pour laquelle l’égoïsme est la vérité même de la représentation. L’argumentaire de la crise est un emmêlement d’argumentations contradictoires qu’on peut ramener à un dénominateur commun assez plat : l’opposition du particulier à l’universel et de l’individuel au communautaire. Ces diagnostics amènent à une conclusion à double fond (hypocrite), à savoir on déplore en cœur le manque d’adhésion, de foi et de passion des individus démocratiques, mais cette déploration en réalité est un verdict, de leur incapacité à être des sujets politiques. Autrement dit ce qu’on déplore on s’en réjouit comme preuve de leur incapacité.

 

 

Les arrangements chez Aristote & la démocratie chez Platon :La haine de la démocratie

Pour revenir chez Aristote : les arrangements étaient le moyen de régler le rapport entre apparence et réalité de la distribution des pouvoirs. Double exigence : il est nécessaire que les démocrates voient la constitution comme réalisation de la démocratie. En revanche, dit Aristote, ils est plutôt souhaitable qu’ils n’exercent pas eux même ce pouvoir qu’ils se voient reconnaître. D’où cette célèbre distinction entre les types de démocratie : La meilleure démocratie c’est la démocratie paysanne, parce que les paysans habitent loin, ils travaillent la terre, ils n’ont pas le temps de venir exercer leur pouvoir à l’assemblée et s’en remettent aux gens qualifiés. On peut dire que c’est du cynisme, mais ce cynisme est aussi la reconnaissance de la politique comme tension des incompatibles, alors que notre actuel discours clinique sur la crise, efface précisément la question de la division au profit de la seule opposition entre l’universel et le particulier. Or il semble plus utile de procéder à la démarche inverse : de partir de cette espèce de dramaturgie de l’équilibre des parties de la cité, pour approfondir la question de la division politique. On peut penser la politique comme le conflit entre des logiques opposées de ce qui constitue la communauté elle-même. Tout le monde connaît la description ironique que fait Platon de la démocratie (La république, livre VIII) : en gros, nous dit-il, la démocratie est le monde à l’envers. Dans la cité démocratique les gouvernés sont indistincts des gouvernants, les maîtres sont à égalité avec leurs élèves, les jeunes sont sur le même plan que les vieux, les esclaves sont aussi comme des hommes libres, les hommes et les femmes jouissent des même prérogatives, et même les animaux participent à cette liberté en encombrant les rues de la cité, refusant de céder le passage à leurs maîtres. Ainsi la démocratie est quelque chose comme anti-nature, le régime où toutes les relations naturelles de dépendances sont abolies. Le coté sérieux de la plaisanterie Platon le donne dans un texte beaucoup plus sobre (Lois, livre III), puisqu’il se présente comme une énumérations neutre et objective des formes existantes d’autorité. Il y a sept titres à gouverner les cités. Six d’entre eux sont fondés sur un rapport de dépendance déjà existants : l’autorité des parents sur les enfants, des vieux sur les jeunes, des nobles sur les vilains, des maîtres sur les esclaves, des plus forts sur les plus faibles, et des savants sur les ignorants. Autrement dit, dans cette logique il y a un fonctionnement circulaire : l’exercice du pouvoir se fonde sur une supériorité manifeste qui l’anticipe, mais inversement l’exercice même du pouvoir prouve en retour ce droit qui le légitime. Le septième titre est le tirage au sort (ce que Platon désigne là, même s’il ne la nomme pas c’est la démocratie). Platon donne là une espèce de principe formel : la démocratie c’est ce qui se passe lorsque les supériorités de naissance, savoir, etc., sont remplacé par le coup de dé. Le problème c’est la rupture de ce cercle de légitimation du pouvoir. Celui qui exerce le pouvoir n’a aucune légitimité, aucun titre pour l’exercer (c’est le pouvoir de n’importe qui).

 

 

Renversement du principe Platonicien :

On peut prendre les choses à l’envers : dire que ce pouvoir aberrant est le seul pouvoir politique, parce la communauté politique, si elle n’est pas simplement l’élargissement de la famille de la tribu, etc., elle doit avoir son propre titre à gouverner. Un titre qu’elle ne partage avec aucune autre forme de rassemblement humain. Le seul titre de ce genre, une fois épuisé tous formes d’autorité déjà existante, est le pouvoir de ceux qui n’ont pas de titre à exercer le pouvoir. Le citoyen, dit Aristote (Politique, livre 3) est celui qui a part au fait de gouverner et d’être gouverné. Celui qui a part à l’un et à l’autre, c’est précisément celui qui n’a pas de raison d’être l’un plutôt que l’autre (inverse du schéma Platonicien). La démocratie n’est pas un régime politique particulier, au sens d’une forme constitutionnelle particulière, mais le principe même de tout gouvernement politique. Pour qu’un gouvernement exerce sur une communauté humaine un gouvernement politique, il est nécessaire qu’il se fonde sur ce principe aberrant, et pourtant nécessaire, d’un gouvernement spécifique de ceux qui n’ont pas de titre à gouverner : ils doivent fonder en dernière instance leur autorité sur un principe qui ruine toute autorité.

 

 

Opposition de deux logiques :

Ce que nous appelons politique est la conjonction contradictoire de deux logiques antagoniques : il y a une logique naturelle : ceux qui gouvernent sont ceux qui ont titre à gouverner parce qu’ils sont les mieux nés, les plus savants, les plus forts, les plus riches, etc. Et selon cette même logique ils prouvent ce titre par l’exercice du pouvoir. Dans cette logique il y a une combinaison de ces titres à gouverner (mariages, etc.), qui fournissent des modèles de gouvernement et des pratique d’autorité qui assurent la reproduction de ce pouvoir : c’est logique de la police. Il y a aussi une deuxième logique, ce qui pour Platon est l’antinature, est qui est exactement inverse : la logique du pouvoir spécifique de ceux qui n’ont pas de titres plus à être gouvernés qu’à être gouvernant. Dès qu’un gouvernement à besoin de se légitimer comme un gouvernement politique, et non pas simplement l’exercice d’une supériorité de fait, il a besoin, si peu que ce soit, de se fonder sur ce pouvoir de n’importe qui.

 

 

Dans le monde d’expérience sensible :

La police comme organisation de la communauté, est comme l’organisation d’un monde d’expériences sensibles dans lequel opèrent l’identification de l’exercice communautaire avec l’exercice du pouvoir par ceux qui sont habilités pour cela. La police en ce sens est la configuration de la communauté comme ensemble de groupes et d’individus qui occupent certaines places, remplissent certaines fonctions. Il produit un certain type de sens commun, ou consensus. Le consensus est l’accord imposé, le monopole du sens qui peut être donné à cette configuration sensible. Du même coup, le consensus définit aussi finalement qui est capable de dire et d’interpréter ce qui est donné. C’est une affaire de spécialiste, une logique de privatisation du pouvoir de tous. De ce point de vue, la prétendue désaffection des citoyens à l’égard des formes de leur pouvoir est d’abord l’œuvre du fonctionnement gouvernemental lui-même : premièrement l’appropriation du pouvoir collectif par une oligarchie de spécialistes de l’exercice politique, mais aussi une logique qui rejette du coté de la sphère privée les interventions des acteurs non étatique. S’en suit la rupture de l’évidence que le donné est donné et que c’est comme ça, la rupture de la distribution des compétences et des incompétences, etc. L’action politique proprement dite de ce fait, est une action par des sujets spécifiques, qui n’agissent pas comme représentant de tel ou tel intérêt ou groupe social, mais comme représentant d’une puissance de tous, une puissance qui précisément est exclue par le fonctionnement normal du pouvoir. L’action politique se soustrait à la distribution simple de l’opposition du particulier à l’universel et de l’individu et du collectif. L’action politique peut se définir comme une forme de singularisation de l’universel.

 

 

Sur ce qui se passe dans la rue lors d’une manifestation (par ex les infirmières ou les enseignants)

Du point de vue de la logique policière, les manifestants expriment leur souffrance ou crient leurs inquiétudes à l’égard de l’avenir, ils lancent des signaux au pouvoir, etc. Du point de vue politique c’est autre choses, à savoir qu’ils ne sont pas là pour manifester leur inquiétude quant à leur avenir, mais ils sont là pour affirmer leur capacité de penser par eux même à l’organisation du travail dans une entreprise, une université, etc. Ils sont là aussi pour affirmer la capacité de n’importe qui à penser le rapport entre le présent et l’avenir.

A partir de là, il est possible de réévaluer le sens et les usages de la notion de crise dans le discours contemporain. La crise nome un état de la tension entre les dynamiques opposés. En allant jusqu’au bout, le manque de choix ou d’adhésion que certains déplorent si forts en un sens est un succès ; un succès de dispositif institutionnel, et de pratiques gouvernementales qui visent précisément à soustraire du pouvoir du peuple.

 

 

Qu’est-ce qui ne fonctionnent plus dans nos institutions ?  :

On pourrait avoir la réponse cynique que en fait elles fonctionnent très bien. L’ensemble des pratiques gouvernementales qui nous dirigent, ont pour fonction naturelle de produire de la désaffection. La crise de la politique est cet état du rapport de force où la logique policière réussit à neutraliser la logique politique. Autrement dit, il n’y a pas de crise, il y a simplement un déficit de politique, un déficit de démocratie. Mais ce déficit on peut le penser comme l’effet d’un certain fonctionnement des institutions et des pratiques de pouvoir. Si on est conséquent, ce déficit de démocratie, il ne faut pas le penser par rapport aux formes d’adhésions aux dispositifs institutionnels de la représentation ; il faut le penser beaucoup plus par rapport aux capacités d’action de sujets politiques autonomes par rapport à ces dispositifs. Ce déficit ne consiste pas alors dans le nombre d’abstention aux élections, mais bien plutôt dans l’incapacité que s’affirment des forces collectives qui aient une sphère d’action autonome, et qui puissent créer une temporalité qui ne soit pas simplement mesurée par rapport à la seule échéance du choix tous les cinq ans d’un des candidats au pouvoir oligarchique. La notion de crise ne dit rien de plus que cet état des rapports entre les deux logiques. Mais il est clair que de nommer cela crise n’est pas indifférent, que ce choix fait partie lui-même d’un système interprétatif, qui s’exerce au profit d’une des logiques en lutte. Ce qu’il s’agit c’est d’imposer un mode d’interprétation qui est justement l’interprétation pathologique (souffrance, malaise, inquiétude), et que ce troupeau de gens malades est clairement distinct de ceux qui exercent la rationalité de l’exercice gouvernemental. L’avantage de ce type de discours, est d’exclure toute idée que le déficit de démocratie ou de politique, soit dû, au fond, à l’action effective de forces antidémocratiques. Ce déficit il plus rentable de l’attribuer à un vice interne de la démocratie : à savoir les vices dits individualistes, d’absence d’obédience ou d’affiliations collectives. L’explication marche à tout coup précisément à cause de l’écart même entre causes et effets : la cause et l’effet ne sont pas sur le même plan que les déficits de politique qui se trouvent attribués à un phénomène sociétal global. Par conséquent à un mal qui ne peut pas être guérit. L’affirmation au fond de la corruption du principe communautaire par ce que les gens appellent individualisme démocratique a pour contenu effectif la négation du pouvoir communautaire comme pouvoir de n’importe qui. Le diagnostic de crise est simplement l’élément d’une machine interprétative qui est là pour dire que les démocrates sont incapables d’exercer leur propre pouvoir, ce qui veux dire évidement que du même coup il vaut mieux que ce pouvoir soi exercer par les spécialistes du pouvoir. En ce sens, le concept de crise, tel qu’il fonctionne aujourd’hui dans l’espace médiatique, est un élément d’une machine interprétative qui fait partie du discours dominant. Il n’a pas de valeur explicative pour lui-même, et si on veut en faire quelque chose il faut le réinscrire dans le réseau des concepts des interprétations à travers lesquelles le pouvoir de tous s’affronte à son contraire. A ce prix là, il peut, peu être, nous aider au moins à repenser ce que nous appelons politique.

Partager cet article
Repost0

_________________________

  • : Le blog d'Axel Evigiran
  • : Blog généraliste ou sont évoqués tout aussi bien des sujets sociétaux qu’environnementaux ; s’y mêlent des pérégrinations intempestives, des fiches de lectures, des vidéos glanées ici et là sur la toile : Levi-Strauss, Emanuel Todd, Frédéric Lordon, etc. De la musique et de l’humour aussi. D’hier à aujourd’hui inextricablement lié. Sans oublier quelques albums photos, Images de châteaux, de cités décimées, et autres lieux ou s’est posé mon objectif…
  • Contact